Des études menées par des scientifiques en Europe et en Amérique du Nord mettent en évidence la responsabilité du dioxyde d’azote dans l’apparition du cancer du sein chez les femmes. La pollution atmosphérique serait en effet associée à une augmentation du risque de tumeur mammaire.
Les méfaits connus des polluants atmosphériques sur la santé
Certains polluants atmosphériques, et notamment les particules en suspension présentes au sein de la pollution atmosphérique globale, sont reconnus comme étant cancérigènes. Si l’on sait déjà qu’ils constituent un facteur de risque du cancer du poumon, on commence à entrevoir aussi son impact dans l’apparition de certains cancers du sein.
On rappelle que le cancer du sein est l’un des cancers les plus courants en Europe.
Pollution et cancer du sein
Des chercheurs de l’INSERM, du CNRS et de l’Université Grenoble Alpes ont étudié la littérature internationale à ce sujet afin de synthétiser des pistes de réflexion. Les résultats ont été publiés dans la revue Environmental Health Perspectives. Ils mettent en évidence une corrélation entre certains polluants atmosphériques et l’augmentation du risque du cancer du sein.
Le dioxyde de carbone représenterait le polluant le plus impactant parmi les trois principaux polluants analysés. Les données révèlent en effet qu’environ 1 700 diagnostics de cancer du sein annuels pourraient être attribués à une exposition aux polluants atmosphériques en France.
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Le dioxyde d’azote est le plus problématique
Le dioxyde d’azote est émis, entre autres, par le chauffage utilisé dans nos villes ou les moteurs thermiques de nos véhicules. Il résulte de plusieurs processus de combustion de combustibles fossiles.
L’étude a porté sur les trois polluants atmosphériques principaux :
- le dioxyde d’azote (N02) ;
- les particules en suspension de diamètre < 2.5 microns (PM2.5) ;
- les particules en suspension de diamètre < 10 microns (PM10).
Les chercheurs ont ainsi analysé les résultats de 36 études sur le dioxyde d’azote lié au cancer du sein en Europe et en Amérique du Nord. Cela représente plus de 120 000 cas sur 3,9 millions de sujets. Les données liées aux PM2.5 représentaient quant à elles 32 études, et celles liées aux PM10, 27 études.
De plus, les résultats indiquent que le dioxyde d’azote représente un risque plus élevé chez les patientes atteintes de cancer du sein hormono-dépendant, même si les études réalisées n’ont pas toutes pris en compte cette donnée.
Au total, l’exposition aux polluants atmosphériques serait responsable d’environ 3 % des cas de cancer du sein diagnostiqués chaque année en France (soit 1 200 personnes par an).
Une estimation des coûts liés aux dépenses de santé et à l’impact sur la qualité de vie des patients a également été réalisée. Elle représenterait une somme comprise entre 600 millions et 1 milliard d’euros chaque année. Cette estimation prend en considération les coûts tangibles et intangibles que peut engendrer ce type de pathologies.
Pour les deux autres polluants atmosphériques (PM10 et PM2.5), les preuves accumulées n’étaient pas suffisantes pour affirmer qu’il existe une réelle augmentation du risque de développer un cancer du sein. Cependant, cette hypothèse n’est pas à exclure, car leur taux de concentration atmosphérique est lié à celui du dioxyde de carbone. Par ailleurs, les hydrocarbures aromatiques polycliques contenus eux aussi dans la pollution atmosphérique sont reconnus pour perturber la fonction des œstrogènes. Il se pourrait donc que ces polluants soient aussi corrélés à certains cancers hormono-dépendants, mais ceci reste à démontrer.
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Des résultats à prendre avec des pincettes
La méthode utilisée au cours de cette étude d’envergure synthétise des résultats de publications disponibles afin d’en faire une moyenne. Il s’agit d’une méta-analyse. Ici, elle permet de considérer la relation dose/réponse entre apparition du cancer du sein et pollution atmosphérique.
Toutefois, certains biais de publication et de confusion entrent en jeu. On sait par exemple qu’une étude qui met en évidence une relation entre pollution et cancer du sein a plus de chances d’être publiée qu’une étude qui contredit ces résultats.
Toutefois, la méta-analyse s’est concentrée sur les publications qui présentent les mesures d’expositions aux polluants les plus précises. Des données plus approfondies quant aux taux d’exposition aux polluants de certaines études seraient nécessaires afin de tirer des conclusions de façon plus formelle.
Le Docteur Eric Sebban est chirurgien gynécologue et cancérologue, spécialisé en chirurgie gynécologique, mammaire et cancérologique.