Des troubles psychologiques multiples et fréquents
Depuis le diagnostic et souvent jusqu’à plusieurs années suivant la rémission, le cancer du sein est responsable d’un bouleversement à la fois physique, psychique et morale.
Anxiété, phobie, dépression, troubles de la personnalité… Les troubles psychologiques sont fréquents et peuvent prendre des formes très variables selon les patientes, leur histoire de vie, leur entourage et le contexte social.
Ces symptômes peuvent émerger à n’importe quel moment, de façon bruyante ou insidieuse. Cependant, certaines étapes de la maladie, bien identifiées par les psychologues, sont particulièrement propices à la perte de repère et à la décompensation émotionnelle.
Parmi elles :
- L’annonce du diagnostic
- La période d’entrée dans les traitements du cancer du sein
- Les intervalles entre deux séances de traitement
- La fin des traitements
- L’après-traitement.
Troubles hormonaux, chimiothérapies, mastectomie, troubles de la sexualité…. Le cancer du sein est particulièrement concerné par le risque d’apparition de ces troubles.
Anticiper et accompagner ces étapes est un premier pas vers l’amélioration de la qualité de vie et la prévention de troubles psychologiques chroniques pouvant se développer ultérieurement à bas bruit.
Dans ce contexte, le soutien émotionnel, tant pour la patiente que pour ses proches, est une des clés, souvent inexplorée, permettant d’améliorer drastiquement la qualité de vie des patientes aussi bien pendant qu’après les traitements.
Pendant : identifier les situations à risques, anticiper, traiter
Face à ces bouleversements, l’apparition de troubles psychologiques est d’autant plus vécue comme culpabilisante pour les patientes, les renvoyant à un sentiment de faiblesse et leur incapacité à maîtriser la situation. Ces symptômes sont alors souvent dissimulés par les patientes, face à leurs proches voir au corps médical.
Il n’existe pour autant nullement de « bonne » façon de réagir. L’objectif est simplement de pouvoir retrouver un équilibre dans une période de rupture afin d’assurer une meilleure qualité de vie, mais aussi d’assurer un plus grand succès des traitements entrepris.
Il est important de toujours garder à l’esprit qu’il s’agit là de symptômes médicaux, pour lesquels les praticiens disposent de traitements, de la même façon que pour une douleur physique. Le médecin devra anticiper les situations à risque précédemment citées et les désamorcer. La patiente devra quant à elle partager le plus précocement possible ses difficultés avec son médecin référent.
Après le cancer : entretenir
Face à d’importants progrès concernant aussi bien le diagnostic que les traitements, s’est rapidement posée la question de la prise en charge d’une population émergente et de plus en plus nombreuse de patientes ayant survécu à la maladie, mais souffrant d’effets collatéraux majeurs (crainte d’une rechute, trouble de l’image de soi, perturbation des relations sociales…).
De nombreuses études ont montré l’effet bénéfique de la prise en charge des troubles psychologiques dans l’amélioration de la qualité de vie.
Ainsi de plus en plus de sociétés savantes européennes et américaines, dont l’American Society of Clinical Oncology (ASCO), ont intégré, dans leurs différentes recommandations de bonnes pratiques, l’importance d’une prise en charge globale et holistique du patient. Cela a notamment permis de faire émerger la notion de médecine intégrative, visant à prendre en compte l’ensemble des aspects (physique, psychique, moral, environnemental) du patient, dans le but d’améliorer sa qualité de vie.
Les outils
De multiples options peuvent être explorées en fonction du type de symptômes, de leur sévérité, de leur évolutivité.
Parmi ces outils :
- Le psychologue: entretiens individuels ou en groupe, prise en charge des proches
- L’entourage: tout en veillant à l’état psychologique des proches eux-mêmes ainsi que leur capacité d’aide aux longs cours.
- Des activités de relaxation et de gestion du stress: yoga, méditation, musicothérapie, acupuncture, massages… ont chacun été intégrés dans les recommandations de bonnes pratiques les plus récentes, montrant un bénéfice en termes de qualité de vie à court et moyen terme chez les patients souffrant ou ayant souffert de cancer.
La première étape consiste donc à en parler précocement avec son cancérologue afin qu’il oriente le mieux la patiente vers la prise en charge la plus adaptée.
BIBLIOGRAPHIE :
1. Institut National du Cancer: le soutien psychologique
2. Integrative Therapies During and After Breast Cancer Treatment : ASCO Endorsement of the SIO Clinical Practice Guideline, Lyman G. et al., Journal of Clinicial Oncology, June 2018
http://ascopubs.org/doi/abs/10.1200/JCO.2018.79.2721
3. Survivorship carel plan: American Society of Clinical Oncology (ASCO) recommandations:
https://www.cancer.net/survivorship
4. Quality of Life at the End of Primary Treatment of Breast Cancer: First Results From the Moving Beyond Cancer Randomized Trial, Ganz P. et al., Journal of the National cancer institute 2004
https://academic.oup.com/jnci/article/96/5/376/2521156
Le Docteur Eric Sebban est chirurgien gynécologue et cancérologue, spécialisé en chirurgie gynécologique, mammaire et cancérologique.